V. Le point de vue de Raymond De Becker
Raymond De Becker (1912-1968) |
En lisant pareil texte, qui flingue en réalité l’initiative degrellienne, on ne peut que constater la volonté de De Becker d’enfiler les pantoufles de l’ancien Soir, affectant de toujours se trouver au-dessus de la mêlée et donnant ses leçons à tout le monde. En réalité, De Becker, évincé du Conseil politique de Rex en janvier 1941, après l’éditorial de Léon Degrelle saluant en Adolf Hitler le libérateur de l’Europe (voir blog Dernier Carré – Léon Degrelle en date du 18 mars 2016 : "Les Journaux de guerre": ça n’en finira jamais... Léon Degrelle, toujours dans le collimateur du CEGESOMA !), tout comme le fit Henri De Man dès le 28 juin 1940, poursuit Léon Degrelle d’une vindicte toute personnelle, s’obligeant à imaginer des alternatives politiques fantômatiquement inexistantes et à prêter au chef de Rex des sentiments antiroyalistes que toutes ses déclarations démentent explicitement…
L’intérêt de l’analyse de De Becker se trouve essentiellement dans l’évocation de la pertinence et de la cohérence de la politique rexiste concernant la question flamande… jusqu’au moment où lui-même quitte le mouvement.
En marge de l’accord Rex-V.N.V.
L’avenir de notre politique intérieure
L’avenir de notre politique intérieure
L’accord qui vient d’être signé entre les dirigeants du mouvement rexiste et ceux du nationalisme flamand constitue une étape normale de notre vie politique intérieure. En effet, ainsi que nous avons eu maintes fois l’occasion de le remarquer, cette vie politique étant nécessairement réduite et limitée du fait de l’occupation militaire, il est inévitable que les seuls actes politiques posés au grand jour le soient par les formations autorisées et que celles-ci cherchent à profiter le plus possible de la situation présente pour prendre des gages sur l’avenir et se mettre dans la situation la plus favorable pour le moment où interviendra un changement dans le statut politique du pays. Il est normal également que ces formations, jusqu’ici dispersées et se rendant compte du peu d’encouragement qu’elles rencontrent auprès de l’opinion publique et même auprès des partisans de l’ordre nouveau, cherchent à réunir leurs efforts et à s’épauler mutuellement. Dans cette perspective et jusqu’à nouvel ordre, les fusions et accords politiques qui peuvent être réalisés entre elles n’engagent que leurs propres dirigeants et ne possèdent aucune signification officielle, que ce soit du point de vue des autorités légitimes de notre pays se trouvant dans l’impossibilité momentanée de se manifester ou du point de vue des autorités de fait, belges ou allemandes, exerçant présentement le pouvoir.
La situation nouvelle en pays flamand
À vrai dire, le nouvel accord Rex-V.N.V. se révèle surtout important pour le pays flamand. C’est là, en effet, que l’on pouvait parler d’une dispersion des groupements politiques : le parti nationaliste flamand y avait à faire face à deux concurrents. Rex-Flandre et le Verdinaso, fondé par Joris Van Severen. Ce sont ces deux concurrents qui sont aujourd’hui éliminés : leurs dirigeants, par une capitulation honorable, renoncent à exercer leur action propre et rentrent dans le V.N.V. dont ils feront désormais partie du Comité de direction, sous la houlette de M. Staf Declercq. Celui-ci emporte donc un succès estimable puisqu’il se voit devenir le chef incontesté du mouvement politique flamand, tel qu’il peut se manifester aujourd’hui.
Pour justifier l’abandon de son action en pays flamand, M. Degrelle a émis des considérations de principe que l’on ne peut qu’approuver. Il a déclaré en substance que les milieux romans de Belgique doivent s’habituer à l’idée de ne plus régenter d’une manière ou de l’autre la vie flamande. Les Flamands doivent décider eux-mêmes de leur destin et c’est à eux qu’il appartient de se prononcer, en toute autonomie, pour ou contre la Belgique, pour ou contre une cohabitation avec les Wallons. M. Degrelle qui, lui, croit à la nécessité d’une collaboration des Flamands et des Wallons au sein d’un Etat commun sous l’égide du Roi, a jugé que la meilleure manière de permettre à nos compatriotes thiois de se prononcer sur l’avenir était de mettre fin aux compétitions se manifestant entre les groupes minoritaires et de faire confiance au développement naturel d’un mouvement nationaliste flamand élargi ainsi qu’au bon sens politique de M. Staf Declercq.
Flandre et Belgique
Que M. Degrelle ait posé un tel acte de confiance, on ne peut s’en étonner puisque, dès 1936, des liens sentimentaux s’étaient noués entre les deux partis d’opposition : Rex-V.N.V. L’accord conclu à cette époque souleva dans tout le pays une hostilité que l’on peut, à distance, juger assez puérile. Nul doute que les dirigeants rexistes avaient fait preuve, à cette occasion, de hautes intentions patriotiques et que l’affaire, malgré les équivoques qui l’entouraient, se présentait en des termes plus favorables qu’aujourd’hui. Il suffit de se rappeler la présence des leaders flamands aux meetings rexistes, chantant la Brabançonne avec tous les assistants pour se rendre compte qu’un événement nouveau s’était produit qui aurait pu avoir les conséquences les plus heureuses pour l’unité de la Belgique. Malheureusement, les tentatives de rapprochement ainsi entreprises de même que celles qui furent accomplies d’un autre côté par P.-H. Spaak furent systématiquement dénaturées et sabotées par une presse en délire, par des politiciens irresponsables et par des groupements d’anciens combattants dont la lucidité politique n’était pas égale aux intentions patriotiques.
Aujourd’hui, on ne peut espérer revoir des spectacles analogues à ceux de 1936. M. Staf Declercq n’a fait aucune déclaration qui puisse donner la moindre garantie aux partisans d’un Etat fédéral belge. Il ne s’est prononcé ni sur la cohabitation des Flamands et des Wallons, ni sur le problème de Bruxelles, et le passage de son discours où il reconnaît aux Wallons « le droit à la vie et le droit au développement populaire » ne précise en aucune manière comment il entend concilier ces affirmations théoriques avec les revendications de certains membres de son parti au sujet de la Wallonie, « espace vital du peuple flamand ». Si l’on ajoute à cela les nombreuses variations de M. Staf Declercq, tant dans le domaine de la politique étrangère que dans celui de la politique intérieure, l’on comprendra que tous ceux qui n’ont pas avec lui les même attaches sentimentales que M. Degrelle, se montrent fort réservés quant à l’avenir et puissent s’étonner de ce que les rexistes flamands n’aient pas obtenu les précisions souhaitables avant d’abandonner leurs organisations et leur activité propre.
À n’en pas douter, M. Degrelle estime que ses anciens partisans parviendront, au sein même du V.N.V., à faire prévaloir les conceptions qui sont les leurs. Il se dit certainement qu’à côté des éléments fanatiques et antibelges qui se trouvent dans le parti nationaliste flamand, il existe des hommes politiques sérieux qui, tels MM. Romsée, Leemans ou Elias, sont capables de tenir compte des réalités historiques et de ne pas faire aux Wallons ce que l’on fit autrefois aux Flamands. Il espère vraisemblablement trouver en ceux-ci des alliés, de telle sorte que la coopération Rex-V.N.V. puisse devenir un jour totale. Ce sont là des opinions dont seul l’avenir pourra démontrer le bien-fondé. Mais quoi qu’il en soit, par l’accord conclu, une situation de fait est créée en pays flamand dont il faudra tenir compte à l’avenir. Certes, des forces politiques flamandes existent encore en dehors du V.N.V. et nous sommes convaincus qu’elles se manifesteront un jour d’une manière ou de l’autre : la jeunesse flamande notamment cache des forces qui s’orienteront dans un sens que ne peuvent soupçonner aujourd’hui les dirigeants d’un ancien parti d’opposition. Mais ces forces qui amèneront peut-être la naissance d’un véritable national-socialisme flamand, devront de toute manière compter avec le rassemblement actuel et devront vraisemblablement se manifester en son sein même.
La situation dans les provinces romanes
L’importance que l’accord conclu donne en pays flamand au rassemblement de M. Declercq n’a pas son équivalent dans les provinces romanes. Le rexisme ne se trouve nullement augmenté par l’événement puisque la dissolution de la section romane du mouvement Dinaso n’a qu’une signification théorique, cette section n’ayant jamais eu qu’une existence confidentielle. Le seul avantage concret que le mouvement rexiste retire de son accord avec le V.N.V. est la promesse que lui fait celui-ci de le reconnaître comme parti correspondant au sein de la Wallonie.
Il faut donc s’attendre à ce que les nationalistes flamands soutiennent les candidats rexistes aux postes de gouverneur, de bourgmestre dans les administrations centrales ou provinciales. On ne peut sous-estimer l’avantage de ce partage d’influences, mais l’on peut légitimement craindre que la nouvelle clientèle ainsi acquise au parti rexiste ne sera qu’une clientèle alimentaire, analogue à celle dont disposaient autrefois les partis catholique et libéral, prête à toutes les trahisons et n’ayant aucune signification révolutionnaire.
À n’en pas douter, M. Degrelle estime que ses anciens partisans parviendront, au sein même du V.N.V., à faire prévaloir les conceptions qui sont les leurs. Il se dit certainement qu’à côté des éléments fanatiques et antibelges qui se trouvent dans le parti nationaliste flamand, il existe des hommes politiques sérieux qui, tels MM. Romsée, Leemans ou Elias, sont capables de tenir compte des réalités historiques et de ne pas faire aux Wallons ce que l’on fit autrefois aux Flamands. Il espère vraisemblablement trouver en ceux-ci des alliés, de telle sorte que la coopération Rex-V.N.V. puisse devenir un jour totale. Ce sont là des opinions dont seul l’avenir pourra démontrer le bien-fondé. Mais quoi qu’il en soit, par l’accord conclu, une situation de fait est créée en pays flamand dont il faudra tenir compte à l’avenir. Certes, des forces politiques flamandes existent encore en dehors du V.N.V. et nous sommes convaincus qu’elles se manifesteront un jour d’une manière ou de l’autre : la jeunesse flamande notamment cache des forces qui s’orienteront dans un sens que ne peuvent soupçonner aujourd’hui les dirigeants d’un ancien parti d’opposition. Mais ces forces qui amèneront peut-être la naissance d’un véritable national-socialisme flamand, devront de toute manière compter avec le rassemblement actuel et devront vraisemblablement se manifester en son sein même.
La situation dans les provinces romanes
L’importance que l’accord conclu donne en pays flamand au rassemblement de M. Declercq n’a pas son équivalent dans les provinces romanes. Le rexisme ne se trouve nullement augmenté par l’événement puisque la dissolution de la section romane du mouvement Dinaso n’a qu’une signification théorique, cette section n’ayant jamais eu qu’une existence confidentielle. Le seul avantage concret que le mouvement rexiste retire de son accord avec le V.N.V. est la promesse que lui fait celui-ci de le reconnaître comme parti correspondant au sein de la Wallonie.
Il faut donc s’attendre à ce que les nationalistes flamands soutiennent les candidats rexistes aux postes de gouverneur, de bourgmestre dans les administrations centrales ou provinciales. On ne peut sous-estimer l’avantage de ce partage d’influences, mais l’on peut légitimement craindre que la nouvelle clientèle ainsi acquise au parti rexiste ne sera qu’une clientèle alimentaire, analogue à celle dont disposaient autrefois les partis catholique et libéral, prête à toutes les trahisons et n’ayant aucune signification révolutionnaire.
Il serait, en effet, vain et dangereux de ne pas voir, à ce propos, la situation dans les provinces romanes telle qu’elle se présente en réalité. Malgré ses efforts, malgré des déclarations patriotiques que l’on ne peut qu’approuver, M. Degrelle et son parti ne sont parvenus ni à conquérir l’opinion publique ni même la majorité des partisans d’un ordre nouveau. Trop d’erreurs ont été commises dans le passé et le sont encore aujourd’hui pour qu’une confiance sans réserve puisse être accordée. D’autre part, il est incontestable que ce que l’on attend partout est vraiment une organisation nouvelle, accueillant avec confiance les collaborations les plus diverses, donnant toutes les garanties au point de vue national et dirigée par des hommes neufs et désintéressés. Que le rexisme ne puisse prétendre à être, comme tel, cette organisation, c’est là une vérité élémentaire qui rencontrera l’adhésion, non seulement de la masse de l’opinion publique, mais encore de la majorité des partisans d’un ordre nouveau. De ce fait, toute prétention rexiste à représenter le parti unique pour les provinces romanes, ne correspond, dans les circonstances présentes, ni à la réalité populaire, ni à la réalité révolutionnaire, pas plus qu’elle ne correspond à aucune consécration officielle, de quelque nature qu’elle soit.
Que faire ?
Cela signifie-t-il, comme le voudraient certains théoriciens de l’action, qu’il faille faire table rase du rexisme ? Ce serait une folie et une erreur politique. Quelles que soient les réserves que l’on puisse faire à l’égard du mouvement rexiste et de son chef, il faut reconnaître que l’un et l’autre ont suivi, depuis des années, une ligne politique claire et nette dont les événements ont confirmé la justesse fondamentale. M. Degrelle et son parti ont défendu avec acharnement, et malgré la coalition d’adversaires puissants et souvent de mauvaise foi, des idées qui sont aujourd’hui admises par tous les esprits politiques sérieux. Ses intempérances de langage, ses erreurs tactiques, son peu d’aptitude au commandement réel ne peuvent faire oublier ses grandes qualités de visionnaire politique, d’entraîneur d’hommes, de lutteur et de propagandiste. Ne pas tenir compte de l’apport précieux qu’un homme comme M. Degrelle puisse apporter au pays ou du capital révolutionnaire que représentent un grand nombre de ses partisans serait tout à la fois commettre une erreur politique et une mauvaise action. Les questions personnelles doivent aujourd’hui céder le pas au service du pays. Les hommes qui entreprennent le redressement de la patrie ne sont pas si nombreux qu’ils puissent se permettre le luxe de se lancer des exclusives à la tête. Malgré les sacrifices de convenances ou d’amour-propre que la chose nécessite, il importe que tous ceux qui ont au cœur l’amour de leur pays travaillent aujourd’hui en équipe à l’action nécessaire.
Mais cela même suppose que M. Degrelle fasse, lui aussi, preuve d’un tel esprit d’équipe et se rende compte que toute prétention au monopole de la représentation politique ou à la direction politique unique dans les provinces romanes est, pour l’instant, insupportable ou, à tout le moins, prématurée. De nombreuses forces d’ordre nouveau existent en dehors du rexisme et se manifesteraient clairement si elles en avaient l’autorisation. C’est à la fois sur elles et sur le rexisme qu’il faudra bâtir pour créer l’organisation politique de l’avenir. Le jour où la rencontre de ces forces sera faite et où les personnalités les plus représentatives du pays ralliées à l’ordre nouveau collaboreront dans un esprit de camaraderie au sein d’une équipe commune, le problème du chef se résoudra de lui-même : l’homme qui se sera imposé par le travail et la valeur à tous ceux qui, au début, étaient ses paires, sera le chef que tout le monde reconnaîtra naturellement. Ce chef sera peut-être M. Degrelle. Il sera peut-être quelqu’un que personne ne connaît aujourd’hui. Mais en attendant qu’il se révèle, nous ne reconnaissons à personne le droit exclusif de parler au nom du pays, sinon au Chef qui nous a sauvés et dont le silence ne peut nous faire oublier les devoirs que nous avons envers lui.
Raymond De Becker
Le Soir, 13 mai 1941.
Que faire ?
Cela signifie-t-il, comme le voudraient certains théoriciens de l’action, qu’il faille faire table rase du rexisme ? Ce serait une folie et une erreur politique. Quelles que soient les réserves que l’on puisse faire à l’égard du mouvement rexiste et de son chef, il faut reconnaître que l’un et l’autre ont suivi, depuis des années, une ligne politique claire et nette dont les événements ont confirmé la justesse fondamentale. M. Degrelle et son parti ont défendu avec acharnement, et malgré la coalition d’adversaires puissants et souvent de mauvaise foi, des idées qui sont aujourd’hui admises par tous les esprits politiques sérieux. Ses intempérances de langage, ses erreurs tactiques, son peu d’aptitude au commandement réel ne peuvent faire oublier ses grandes qualités de visionnaire politique, d’entraîneur d’hommes, de lutteur et de propagandiste. Ne pas tenir compte de l’apport précieux qu’un homme comme M. Degrelle puisse apporter au pays ou du capital révolutionnaire que représentent un grand nombre de ses partisans serait tout à la fois commettre une erreur politique et une mauvaise action. Les questions personnelles doivent aujourd’hui céder le pas au service du pays. Les hommes qui entreprennent le redressement de la patrie ne sont pas si nombreux qu’ils puissent se permettre le luxe de se lancer des exclusives à la tête. Malgré les sacrifices de convenances ou d’amour-propre que la chose nécessite, il importe que tous ceux qui ont au cœur l’amour de leur pays travaillent aujourd’hui en équipe à l’action nécessaire.
Mais cela même suppose que M. Degrelle fasse, lui aussi, preuve d’un tel esprit d’équipe et se rende compte que toute prétention au monopole de la représentation politique ou à la direction politique unique dans les provinces romanes est, pour l’instant, insupportable ou, à tout le moins, prématurée. De nombreuses forces d’ordre nouveau existent en dehors du rexisme et se manifesteraient clairement si elles en avaient l’autorisation. C’est à la fois sur elles et sur le rexisme qu’il faudra bâtir pour créer l’organisation politique de l’avenir. Le jour où la rencontre de ces forces sera faite et où les personnalités les plus représentatives du pays ralliées à l’ordre nouveau collaboreront dans un esprit de camaraderie au sein d’une équipe commune, le problème du chef se résoudra de lui-même : l’homme qui se sera imposé par le travail et la valeur à tous ceux qui, au début, étaient ses paires, sera le chef que tout le monde reconnaîtra naturellement. Ce chef sera peut-être M. Degrelle. Il sera peut-être quelqu’un que personne ne connaît aujourd’hui. Mais en attendant qu’il se révèle, nous ne reconnaissons à personne le droit exclusif de parler au nom du pays, sinon au Chef qui nous a sauvés et dont le silence ne peut nous faire oublier les devoirs que nous avons envers lui.
Raymond De Becker
Le Soir, 13 mai 1941.
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